Ensemble dans la lutte contre la covid-19 : Une stratégie transfrontalière au lieu de fermetures strictes des frontières !
Publié le 25/02/2021 dans les catégories Europe
Ce 24 février 2021 j’ai participé à la réunion en urgence du bureau de l’Assemblée parlementaire franco-allemande. Nous avons décidé de publier un texte destiné aux gouvernements français et allemand afin de tirer les enseignements du passé récent concernant la gestion de la pandémie de part et d’autre du Rhin et pour que vive une vraie stratégie transfrontalière.
Déclaration de membres du bureau de l’Assemblée parlementaire franco-allemande
Ensemble dans la lutte contre la covid-19 : Une stratégie transfrontalière au lieu de fermetures strictes des frontières.
Pacta sunt servanda ! Dans le Traité d'Aix-la- Chapelle, l'Allemagne et la France reconnaissent l'importance de la coopération transfrontalière pour les régions frontalières étroitement liées. Cela doit également s'appliquer maintenant, dans le contexte de la crise. En tant que membres du bureau de l'Assemblée parlementaire franco-allemande (APFA), nous demandons donc une stratégie commune pour les bassins de vie transfrontaliers pour lutter contre la pandémie de covid-19 au lieu de décisions nationales unilatérales aux frontières. Nous devons agir résolument et de manière conjointe pour éviter une situation semblable à celle du printemps 2020. Le Traité d'Aix-la- Chapelle stipule par ailleurs que la coopération franco-allemande doit aussi servir de modèle à l'ensemble de l'Europe. C'est pourquoi nous demandons une cohérence européenne dans la lutte contre le coronavirus dans la perspective du Conseil européen des 25 et 26 février 2021.
Nous avons également besoin d'une réponse européenne aux défis de la pandémie avec des stratégies transfrontalières de restriction de la mobilité. Il faut donc des réglementations cohérentes et coordonnées au niveau européen pour lutter contre le virus et limiter la propagation des variants, contre laquelle les restrictions de mobilité à l’échelle régionale sont le facteur décisif. Pour combattre efficacement le virus, nous avons davantage besoin d’initiative européenne que de nouvelles barrières nationales.
Le vivre ensemble dans les régions frontalières est fondamentalement différent du voyage touristique en Europe. C'est pourquoi nous avons besoin de concepts et de mesures ciblés pour nos bassins de vie transfrontaliers. Depuis le début de la pandémie, l’APFA s’engage résolument pour une coopération transfrontalière plus étroite dans la lutte contre la covid-19, à l’image des auditions des ministres de l’Intérieur Christophe Castaner et Horst Seehofer le 28 mai 2020 et des ministres de la Santé Olivier Véran et Jens Spahn le 21 septembre 2020. De cette façon, nous pouvons lutter de manière plus efficace contre la pandémie qu’avec des fermetures de frontières. Il en va de même aujourd'hui : avec l’application de mesures rigoureuses de part et d’autre de la frontière, la propagation des variants doit être efficacement évitée. Parallèlement, la pandémie doit être combattue rigoureusement de part et d’autre de la frontière pour empêcher une diffusion plus large des variants. Dans nos bassins de vie franco-allemands, il faut combiner la meilleure protection sanitaire possible avec la plus grande perméabilité possible de la frontière. L'interdépendance est si étroite qu'elle ne peut être réduite aux seuls trajets des travailleurs frontaliers. Des familles et des couples vivent égale- ment de part et d'autre de la frontière mais tout de même ensemble dans ces bassins de vie.
Une stratégie commune doit être mise en œuvre en étroite coopération et coordination entre les gouvernements et les parlements à Paris et à Berlin, la région Grand Est et les trois Länder allemands du Bade-Wurtemberg, de la Rhénanie-Palatinat et de la Sarre, ainsi que les représentants des communes, et en impliquant étroitement le Comité de coopération transfrontalière, créé par le Traité d’Aix-la- Chapelle. Le groupe de travail de haut niveau qui doit élaborer des propositions pour intensifier la coopération transfrontalière dans la lutte contre la pandémie et coordonner des mesures communes peut servir de modèle à cet égard.
C’est pour ces raisons que nous demandons une stratégie en 5 points pour combattre ensemble la pandémie dans les bassins de vie franco-allemands :
- Une stratégie de dépistage commune avec la reconnaissance mutuelle des tests rapides et la création de centres de dépistage partagés dans toute la région frontalière franco-allemande, sur le modèle de la coopération de l'Eurodistrict Sarre-Moselle, afin que le trafic frontalier puisse être maintenu d'une manière adaptée à la pandémie.
- Les frontières ne doivent pas être refermées. En cas de besoin, les contrôles ne devraient pas être effectués aux points de passages autorisés mais de façon aléatoire à distance de la frontière par l’unité opérationnelle franco-allemande (UOFA) et les équipes binationales des forces de l’ordre.
- Les restrictions respectives d'entrée sur le territoire, liées à la pandémie, en particulier en matière de dépistage, de quarantaine ainsi que les tests autorisés doivent être étroitement coordonnées et communiquées conjointement. Une concertation et une communication constante et intensive doivent également avoir lieu en ce qui concerne les règles sanitaires respectives en vigueur, afin d'éviter des effets de déplacements.
- Pour gagner en lisibilité, les données de base notamment le taux d’incidence, les résultats positifs et le séquençage des tests relevés de part et d’autre de la frontière, doivent être comparables et communiquées plus régulièrement. Le réseau EPIRHIN de la Conférence du Rhin supérieur, en tant que plateforme trinationale, et la Grande Région, en tant qu'institution quadrinationale, doivent devenir des projets pilotes pour une coordination qui soit la plus étroite possible sur les questions de santé et cela également avec d'autres pays voisins.
- Il faut améliorer encore le traçage transfrontalier, notamment par l’interconnexion des applications nationales de traçage de covid-19 dans le cadre de la passerelle d’interopérabilité européenne, tout en supprimant autant que possible les barrières linguistiques entre les autorités sanitaires grâce à l’implication de personnes bilingues.
Patrick Hetzel
Député du Bas-Rhin