Dignité de la personne humaine

Publié le 09/08/2019 dans les catégories Santé Vie sociale

Patrick Hetzel vient de cosigner une proposition de loi constitutionnelle qui énonce les principes de respect de la dignité de la personne humaine et du caractère non patrimonial du corps humain.

Le moment est venu, pour le Constituant, d’énoncer explicitement les principes essentiels dont le respect est nécessaire afin qu’aucune stipulation de droit international, aucune loi, aucun contrat ne vienne contredire, dans l’ordre juridique français, ce qui a été, jusqu’alors, le modèle de bioéthique choisi par notre pays. La jurisprudence des cours suprêmes françaises a, au début des années 1990, reconnu certains de ses principes. D’une part, le Conseil constitutionnel, dans une décision n°94-343/344 DC du 27 juillet 1994, a relevé que les lois relatives à la bioéthique dont il était alors saisi avaient énoncé « un ensemble de principes au nombre desquels figurent la primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine » ; il a jugé que les principes à valeur législative ainsi affirmés « tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine », qu’il a ainsi, pour la première fois, expressément reconnu. D’autre part, la Cour de cassation, dans un arrêt d’assemblée plénière du 31 mai 1991, a jugé que « la convention par laquelle une femme s’engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes ».

Mais sous l’influence de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et, singulièrement des arrêts Mennesson et Labassée c/France du 26 juin 2014, la Cour de cassation a considérablement atténué la portée du principe d’indisponibilité du corps humain. Par un arrêt d’assemblée plénière du 3 juillet 2015, elle a cru pouvoir juger que le caractère illégal en droit français d’une convention de mère porteuse ne faisait pas obstacle à la transcription en France de l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger d’une telle convention. Par ce détour, la Cour de cassation s’est aventurée, hélas, sur le chemin d’une reconnaissance, en droit français, des conventions dites de gestation pour autrui (GPA), lesquelles consistent en réalité à utiliser le ventre d’une femme comme une chose louée, aux fins d’abandon d’un enfant faisant le plus souvent l’objet d’une cession à titre onéreux, c’est-à-dire d’une vente. Au demeurant, dans son étude relative à l’éthique adoptée le 28 juin 2018, le Conseil d’Etat a estimé que : « en l’état de la jurisprudence, rien ne permet d’affirmer que la légalisation de la gestation pour autrui serait inconstitutionnelle alors même qu’elle heurte la substance même du modèle de bioéthique tel qu’il existe aujourd’hui. »

Il est temps que le Constituant affirme explicitement les principes bioéthiques de la France afin qu’aucune stipulation de droit international, aucune loi, aucun contrat ne puisse les méconnaître. C’est pourquoi il est proposé, à l’article unique de la présente proposition de loi constitutionnelle, de compléter l’article 1er de la Constitution afin que la République assure le respect de la dignité de la personne humaine et garantisse le caractère non patrimonial du corps humain.