Pour un référendum d'initiative populaire, législatif, abrogatoire et révocatoire

Vie sociale

La crise des « Gilets jaunes » a avéré une urgence, celle de combler le fossé qui ne cesse de se creuser entre les citoyens et leurs dirigeants. Au-delà de la question fiscale et sociale, cette révolte populaire a révélé un sentiment de dépossession, de perte de contrôle de leur destin de la part de nos concitoyens. Le pouvoir politique leur échappe dans un contexte de métropolisation et de mondialisation croissant, et dans lequel une haute administration d'Etat détient de plus en plus de pouvoir, sans avoir aucun compte à rendre. Cette crise a parallèlement fait émerger le désir d'une citoyenneté plus active et plus exigeante, celle d'une participation directe à la prise de décision publique entre les échéances électorales. Dans cette perspective, une rénovation démocratique s'impose. L'une des voies les plus évidentes de cette rénovation est celle du référendum d'initiative populaire. 

Le référendum d'initiative partagée, dispositif résultant de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 apparait peu satisfaisant : son effectivité est limitée, voire inexistante ; et l'initiative appartient en réalité aux seuls parlementaires. Le fait que ce référendum d'initiative partagée n'ait pas été mis en œuvre témoigne de son caractère inopérant.

Patrick Hetzel cosigne une proposition de loi constitutionnelle tendant à instituer un référendum d'initiative populaire, législatif, abrogatoire et révocatoire.

L'article 1er de cette proposition de loi constitutionnelle tend ainsi à créer un véritable référendum d'initiative populaire, tant législatif qu'abrogatoire et à l'accès facilité. L'initiative référendaire est mise entre les mains des citoyens. Le champ référendaire est élargi à toutes les matières législatives. Le nombre de citoyens requis pour la mise en œuvre de la procédure est profondément abaissé. Le seuil de 10 % du corps électoral, soit 4,5 millions de signatures, contre 1 à 2 % en Espagne et en Italie, soit 500 000 signatures, semble en effet presqu'impossible à atteindre. Il est proposé de ramener ce seuil à 3 % des électeurs inscrits, soit un peu plus de 1 300 000 électeurs. Il est renvoyé à loi organique le soin de préciser les modalités selon lesquelles le Parlement et le Président de la République seront appelés à se prononcer sur l'initiative populaire et pourront soumettre au référendum un contre-projet répondant à l'initiative populaire. En contrepartie, deux garde-fous sont proposés. D'une part, un contrôle constitutionnel a priori de la proposition référendaire pour éviter toute dérive.

D'autre part, une condition de participation pour la validité des résultats du référendum, porté à 25% du corps électoral, afin qu'une minorité trop étroite ne soit pas en mesure de prendre des décisions en misant sur l'indifférence des autres citoyens. Un seuil de 50% de participation semble en revanche trop élevé au regard de l'expérience italienne : depuis le milieu des années 1990, les Italiens ont répondu « oui » à quasiment toutes les consultations, mais elles ont pourtant toutes été annulées faute d'un nombre de participants suffisant. Enfin, cet article 1er supprime en conséquence le dispositif de référendum d'initiative partagé. En revanche, la possibilité d'un référendum constituant est écartée, pour des raisons de stabilité institutionnelle et pour préserver aux modifications constitutionnelles la gravité qu'elles doivent avoir. La possibilité de réviser la Constitution est toujours possible, telle que prévue à l'article 89 de la Constitution (à l'initiative du Président de la République ou des membres du Parlement).

Une autre avancée institutionnelle proposée consiste à permettre, dans les conditions et limites fixées par la loi organique, la révocation, qui permettrait aux électeurs de se prononcer sur l'action d'un élu au cours de son mandat. Etrangère à notre droit, cette procédure de recall est néanmoins très répandue aux Etats-Unis. Si cette pratique est encadrée, elle peut être vertueuse et contribuer à une meilleure performance et un meilleur contrôle de l'action publique. L'article 2 institue ainsi un référendum révocatoire qui permettra, à l'initiative d'au moins 30 % du corps électoral concerné d'enclencher une procédure de referendum visant à révoquer un élu membre d'un organe exécutif local au cours de son mandat. Cette révocation, motivée, ne pourra avoir lieu qu'une seule fois pendant la durée du mandat et ne pourra intervenir ni lors de la première année ni lors de la dernière année du mandat. De même que pour le référendum législatif tel que défini à l'article 1er, une condition de participation pour la validité des résultats du référendum révocatoire est posée et portée à 25 % du corps électoral. Enfin, il est proposé de faciliter l'exercice de la démocratie directe au niveau local. 

C'est l'objet de l''article 3 qui tend à rendre effectif le droit de pétition devant les collectivités territoriales, inscrit dans la Constitution en 2003, en permettant à leurs électeurs, dans les conditions et limites fixées par la loi organique, d'« obtenir » - et non plus seulement « demander » - l'inscription à l'ordre du jour d'une assemblée locale d'une question relevant de sa compétence.  L'article 3 modifie également l'alinéa 2 de l'article 72-1 de la Constitution : l'initiative du référendum local n'appartient plus seulement aux collectivités mais est élargie à une fraction d'électeurs. La loi organique détermine les conditions et champ de cette initiative référendaire au niveau local.