Interdire les prestations de conseil pro-bono à l’égard de toutes administrations ou partis politiques
Publié le 19/02/2021 dans les catégories Politique
La presse a récemment révélé que de grandes structures de conseil de la place parisienne avaient dispensé à titre gracieux « pro-bono » (« pour le bien public ») des prestations à l’égard d’acteurs du secteur public ou de partis politiques. Loin d’être vertueuse, la réalisation gratuite de ces prestations pose au minimum un indiscutable problème d’éthique et de transparence.
Auprès des administrations publiques, de telles missions interrogent sur les questions de transparence, d’influence et de contrepartie. En termes de transparence, elles permettront aux cabinets de conseil d’échapper aux obligations déclaratives auxquelles tous les représentants d’intérêt sont soumis puisqu’elles sont réputées répondre à une demande de l’autorité publique. Pourtant, il est difficile de croire que ces structures ne portent pas avec elles d’intérêts autres que ceux de la puissance publique. En outre, de telles interventions permettent à ces entreprises de conseil de se constituer un réseau d’obligés au sein de l’appareil. Tôt ou tard, les services gracieusement apportés se paieront.
Auprès des partis politiques, ces interventions posent des problèmes encore plus graves. Depuis la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, les apports de personnes morales de droit privé aux partis politiques comme aux campagnes électorales sont totalement prohibés. En matière de campagne électorale, ils sont sanctionnés par le rejet des comptes et l’annulation de l’élection. Auprès des partis politiques, ils sont tout aussi illégaux mais plus difficilement vérifiables puisqu’au terme de l’article 4 de la Constitution, les partis politiques « se forment et exercent leur activité librement », ce qui interdit quelque contrôle qui soit sur leurs dépenses (et a fortiori leurs non-dépenses). Si toutefois une telle intervention gracieuse d’un cabinet de conseil auprès d’un parti politique était révélée, elle constituerait de la part des dirigeants de l’entreprise qui l’auraient autorisée, et de la part des dirigeants politiques qui l’auraient acceptée, des délits d’abus de bien sociaux et recel d’abus de bien sociaux.
C’est pourquoi Patrick Hetzel vient de cosigner une proposition de loi qui vise à interdire la pratique du « pro-bono » à l’égard de toutes administrations, afin de réduire les liens de dépendance entre responsables publics et cabinets de conseil (article premier). Elle vise à la même interdiction pour les partis politiques, qui depuis 1988 ne peuvent recevoir de dons de la part de personnes morales, le « pro-bono » constituant bien une forme de don (article 2). Cette pratique doit donc être réservée aux associations à but non-lucratif ou aux organisations non gouvernementales.