L’accentuation des dysfonctionnements de la justice durant la crise de la COVID-19
Publié le 12/06/2020 dans les catégories Justice
Lors du débat sur le fonctionnement de la justice durant la pandémie, le 9 juin, Patrick Hetzel a interpellé la Garde des Sceaux. Il lui a rappelé que lors de l’audition devant la mission d’information COVID-19 à l’Assemblée nationale le 8 avril dernier, elle disait que les tribunaux restaient ouverts pour le travail lié aux contentieux d’urgence et essentiel comme les procédures concernant des violences au sein de la famille, des atteintes aux personnes, le non-respect des règles du confinement.
Or, ce qui a été observé, c’est une très grande disparité de fonctionnement entre les juridictions et une application des instructions de la Chancellerie qui variait d’une juridiction à l’autre. Ce ralentissement de l’activité des juridictions est inédit et il est préoccupant et ce d’autant qu’il vient s’ajouter aux difficultés liées à la grève des avocats précédant la pandémie.
Face à l’arrêt quasi-total des juridictions, sa première question est très simple : était-il indispensable de réduire à ce point le fonctionnement des juridictions et, si oui, pourquoi ?
Pour y remédier la Ministre a annoncé qu’il sera procédé au recrutement de 1000 vacataires pendant 3 mois, pour soutenir les greffes. Manifestement cela ne sera pas suffisant, puisque le projet de loi portant diverses dispositions liées à la crise sanitaire prévoit d’autres mesures, à savoir la réorientation des contentieux et l’extension des cours criminelles. Dans les deux cas, on peut s’inquiéter des conséquences de ces mesures sur l’indépendance de la justice et sur les droits de la défense.
Il pointe également le fait que, dès le début du confinement, le ministère a procédé sans ambages au remerciement de tous les magistrats à titre temporaire qui servaient dans les tribunaux. Alors qu’ils avaient rendus des services importants à l’institution judiciaire, ils se sont retrouvés sans ressources et d’ailleurs la plupart d’entre eux n’ont toujours pas touché les indemnités qui leurs sont pourtant dues au moment où je parle.
Ce quasi arrêt de l’activité judiciaire a conduit au report de plusieurs milliers d’affaires, ce qui va encore aggraver l’engorgement déjà très fort des juridictions.
Concernant le plan de transformation numérique, la dématérialisation des procédures civiles aurait dû permettre la poursuite des mises en état et la notification des jugements, mais force est de constater que les magistrats et encore plus les greffiers, ne peuvent pas tous travailler de chez eux, n’ayant pas accès à des logiciels sécurisés.
En conclusion, beaucoup de justiciables pâtissent de cette absence de réponse et les dossiers ne cessent de s’amonceler.
Aussi, il interroge la Garde des Sceaux sur la stratégie qu’elle envisage pour répondre enfin aux légitimes attentes des justiciables et des professionnels du droit qui ont besoin de réponses et de sécurité juridique. En effet, depuis la levée du confinement voici maintenant un mois, on constate que la reprise de l’activité juridictionnelle se fait vraiment très progressivement et c’est un euphémisme.
En dernier lieu, il souhaite savoir si la Ministre va répondre favorablement au Conseil National des barreaux, qui représente les 70 000 avocats de France, qui demande la suspension totale des congés d’été dans les juridictions pour faire face à l’urgence judiciaire.