Rendre effectifs les droits des personnes en situation de handicap
Publié le 15/09/2023 dans les catégories Economie Education nationale Santé Vie sociale
En 2018, un collectif d’associations françaises attaché à défendre les personnes en situation de handicap déposait une réclamation auprès du Comité des droits sociaux du Conseil de l’Europe pour dénoncer la violation de droits des personnes en situation de handicap par l’Etat français.
Ce collectif soulevait des carences notables dans plusieurs domaines.
En matière de ressources :
Selon des données publiées par le ministère de la solidarité, la moitié des personnes handicapées ont un niveau de vie inférieur à 1 426 euros par mois, près de 300 euros de moins que le niveau de vie médian des personnes valides. 19,5 % des adultes handicapés vivent sous le seuil de pauvreté. Près de 840 000 personnes handicapées vivent dans la pauvreté. Le handicap peut rendre la vie quotidienne plus coûteuse. En effet, ces personnes peuvent avoir besoin d’un logement accessible, d’équipements spécifiques, de services d’aide, de soins, etc., ce qui contraint encore plus les budgets des plus modestes d’entre elles.
En matière d’accessibilité :
La loi « handicap » du 11 février 2005 avait apporté beaucoup d’espoir puisqu’elle devait rendre, dans un délai de 10 ans, les administrations, les commerces, les écoles, les habitations, les transports et la voirie accessibles à toutes les personnes en situation de handicap.
Dans les faits, l’Etat n’a pas tenu ses promesses. Des retards considérables ont été pris par tous les acteurs dans le domaine – publics comme privés. Des délais supplémentaires ont été accordés pour des mises aux normes sans encourir de sanctions. Les associations ont alors dénoncé des nouvelles réglementations décalant indéfiniment la mise en accessibilité réelle. Cela n’est pas sans conséquence pour permettre aux personnes en situation de handicap d’accéder aux services publics et aux transports.
Des difficultés demeurent aussi pour l’accessibilité aux logements. Selon le conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), en France, seulement 7 % des logements sont considérés comme totalement accessibles. Les constructions neuves ne répondent souvent pas toutes aux normes d'accessibilité et la rénovation des logements existants progresse à un rythme jugé trop lent.
En matière de santé :
En 2022, 22 % des personnes en situation de handicap n'ont pu accéder aux soins dont ils avaient besoin, avec des chiffres trimestriels en hausse. Plus inquiétant, le taux de refus de soins s'élève à 14 % et les analyses du baromètre Handifaction précisent que le taux d'abandon de soins a augmenté à 17 %, en hausse de 2 points par rapport au 3e trimestre 2022. Les principales raisons d'abandon sont le refus des soignants, la perte de l'envie de se soigner, l'impossibilité de savoir où se rendre ou le montant du reste à charge.
En matière de protection sociale :
Plusieurs millions de proches aidants apportent une aide régulière et fréquente, dans un cadre non professionnel, à une personne handicapée. Ces proches aidants assument un rôle indispensable du fait du manque de structures d’accueil pour enfants handicapés ou pour personnes handicapées vieillissantes. Cela entraîne des conséquences concrètes pour ces proches aidants dans leur vie : maintien ou non dans la vie professionnelle, risque d’isolement, danger de repli, perte de lien social, épuisement, sentiment de culpabilité… Ils peuvent être touchés par des pertes de droits (congés, retraite…) et se retrouver précarisés.
En matière d’éducation :
Chaque année, plusieurs milliers d’enfants porteurs de handicap se voient dans l’obligation de rester chez eux, faute d’avoir trouvé une solution de scolarisation adaptée à leurs besoins spécifiques. D’autres ne sont admis qu’à temps partiel ou selon des modalités inadaptées à leur pathologie. D’après les résultats d’une enquête réalisée par l’Unapei, 23% de ces enfants n’ont accès à aucune heure de scolarisation, 28% n’ont qu’entre zéro et six heures de scolarisation, 22% n’ont que six à douze heures de scolarisation, et seulement 27% ont plus de douze heures de scolarisation. Cela est source de grande inquiétude pour les parents souvent démunis à la veille d’une rentrée scolaire. Les parents sont dans la nécessité de combler par eux-mêmes l’emploi du temps des enfants porteurs de handicap, avec un coût financier important.
Parfois, le monde scolaire est totalement inadapté pour ces enfants, et commence alors le parcours du combattant pour trouver une place dans un établissement spécialisé. Selon certains parents, l’attente peut durer plusieurs années.
Le Conseil de l’Europe vient de condamner, par une décision rendue publique le 17 avril, les lacunes de la politique française du handicap, qui ne respecte pas la charte sociale européenne. Il y dénonce la violation des droits des personnes en situation de handicap par l’Etat français : manque d’accompagnement et pénurie de services de soutien, injustices socio-économiques, difficulté d’accès au logement, à la santé, mais aussi refus de scolarisation, manque de protection sociale des familles concernées… La liberté et la dignité des personnes en situation de handicap et de leurs familles sont entravées, leurs droits bafoués.
Pour toutes ces raisons, Patrick Hetzel a pris l’initiative d’une proposition de résolution visant à rendre effectifs les droits des personnes en situation de handicap.